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vendredi 10 janvier 2025

Blake & Mortimer T30 Signé Olrik

Bien sûr, aucune preuve historique ne vient étayer ces récits.


Ce tome fait suite à Blake & Mortimer T29 Huit heures à Berlin (2022). Sa parution initiale date du 31 octobre 2024. Il est sorti aux éditions Blake & Mortimer (groupe Dargaud).  L’album a été réalisé par le Bruxellois Yves Sente pour le scénario et par André Juillard (1948-2024) pour les dessins, avec Madeleine Demille (une habituée du la série, elle aussi) pour la mise en couleur. Il comprend soixante-deux pages de bande dessinée, toutes en couleurs.

Il s’agit du huitième volume de la série réalisé par ce duo de créateurs ; à eux deux, Sente et Juillard forment ce qui est communément considéré comme la première équipe de l’ère post-jacobsienne de la série, c’est-à-dire depuis 1996. L’éditeur dédie Signé Olrik à la mémoire de Juillard.


Début du récit

En cette fin d’après-midi orageuse, de nombreux pensionnaires de la prison londonienne de Wandsworth se sont approchés de la fenêtre de leur cellule, attirés par des bruits qu’ils ne connaissent que trop bien… Un des leurs sera pendu ce soir.

Les gardiens et le juges viennent chercher le détenu concerné : l’un d’eux annonce à Olrik que c’est l’heure, et il demande au colonel de mettre les mains dans le dos. Ce dernier proteste qu’il est trop tôt et demande ce qu’il en est de son dernier pourvoi. Le magistrat répond que ses demandes de recours ont été rejetées, que son existence vouée au mal s’arrête ici. Le nœud coulant est passé autour du supplicié ; le magistrat lui dit de recommander son âme au diable, car la communauté des hommes l’a condamné à mort. Devant les visages fermés de Blake et Mortimer, il donne l’ordre au bourreau de faire son office. Celui-ci actionne le levier, et la trappe se dérobe sous les pieds d’Olrik, qui pousse un dernier cri. Le renégat se réveille en sursaut sur sa couchette dans sa cellule : un gardien lui annonce l’arrivée de deux codétenus : Edwann et Riwal.



Les trois individus commencent à faire connaissance dans la cellule, lorsque Riwal court aux barreaux de la fenêtre : il a reconnu le son, pile à l’heure. Au même moment, un Westland Lysander peint en noir apparaît entre les nuages qui se dispersent au-dessus de Londres. L’avion de liaison plonge sur la Tamise, qu’il remonte à faible altitude sous les regards étonnés des Londoniens. Arrivé à la hauteur de Scotland Yard, le pilote entame une spectaculaire manœuvre de remontée pendant que son passager ouvre la verrière arrière. Dans un bureau, Francis Blake ouvre la fenêtre, et il s’empare d’un des tracts balancés par l’avion. Il le lit à son interlocuteur : Au gouvernement illégitime d’Angleterre… Libérez nos frères patriotes de vos prisons et dites au Premier Ministre de renoncer à faire venir de nouveaux migrants en terre libre de Cornouailles. Demain, avant minuit, nous donnerons une preuve de notre détermination et de ce qui attend le prince héritier s’il maintient sa venue sur l’île de Corineus. – F.C.G. (The Free Cornwall Group). Le pilote de l’avion effectue un dernier passage rapide au-dessus de Wandsworth pour saluer ses frères du FCG, puis il entame le trajet de retour. Edwann et Riwal sont enchantés, et ils confient un tract à Olrik pour qu’il s’instruise. Au même instant, au nord de Londres, une conférence de presse s’achève au sein des locaux abritant le célèbre Center for Scientific and Industrial Research. Philip Mortimer y a présenté une excavatrice de poche, baptisée la Taupe.


Les grandes lignes ou Un cadre original

Déjà le trentième album des aventures de Blake & Mortimer, et le dix-huitième réalisé par une équipe de repreneurs. Les deux auteurs sont rodés à l’exercice, et ils respectent les caractéristiques à la lettre, avec parfois quelques petites variations : une douzaine de cases par page en moyenne, alignées en bande, avec des bordures rectangulaires bien nettes, un registre visuel de type ligne claire. Une intrigue bâtie pour mettre en valeur les deux héros aux solides valeurs morales, avec une forme de stoïcisme hérité du flegme britannique, sans oublier leur ennemi emblématique Olrik, et le rôle des femmes quasi inexistant. Le scénariste choisit de localiser le récit dans un endroit bien précis : les Cornouailles, un comté du Royaume-Uni. L’intrigue évoque un mouvement fictif peut-être pas indépendantiste, mais régionaliste : Free Cornwall Group. Il évoque un pan de l’histoire très particulier de cette région : la légende arthurienne.

De son côté, le dessinateur participe lui aussi à cette dimension du récit avec des paysages dont les qualités touristiques donnent envie : la route submersible par la marée reliant l’île, fictive elle aussi, de Corineus (guerrier légendaire et premier duc de Cornouailles) au comté, avec une très belle mise en couleur pour une nuit de brouillard, la maçonnerie de cette route par temps clair, un pub fort accueillant, des routes de campagne verdoyantes, les rues bordées de maisons basses du village (inventé) de Longval, son loueur de chevaux, son site minier, son port, sa très belle église, etc.



Composante historique

De nombreux passionnés de la série tentent toujours de relever le petit détail (un calendrier, une coupure de journal) qui leur permettra de déterminer la place de l’album dans la chronologie de Blake & Mortimer. Ici, rien de précis. Le Lysander ayant été retiré du service par la Royal Air Force en 1946 (mais utilisé par les forces aériennes égyptiennes jusqu’en 1949), il est probable que l’histoire se déroule entre 1948 (la Morris Six MS, dont un exemplaire apparaît dans la première case de la planche 6, n’a été produite qu’à partir de cette année-là) et la première moitié des années cinquante. Si le lecteur effectue quelques recherches, il apprendra que l’actuel Charles III fut duc de Cornouailles de 1952 (il avait alors quatre ans) à 2022. Le sous-secrétaire d'État au Home Office, Harvey Twiston-Jones, mentionne (en planche 5) la jeunesse du duc, ce qui semble cohérent avec une intrigue se déroulant vraisemblablement lors de la première moitié des années cinquante.



Les deux amis partent donc pour une nouvelle aventure en Cornouailles (un bien curieux choix) pour mettre fin aux actions terroristes, dans des lieux aux noms fortement connotés comme Tintagel et Avalon. Pour y parvenir, ils vont être forcés de commettre l’impensable : participer à la libération de prison d’Olrik (une première dans l’histoire de la série, il faut le souligner). Le lecteur comprend immédiatement de quel mythe il va être question, se demandant jusqu’où iront les auteurs dans cette veine. En fonction de sa familiarité avec les mythes celtiques, il apprécie le recul de la version choisie par le scénariste, ou il découvre cette approche différente de celle plus enjolivée retenue dans la culture de masse. Il écoute (enfin, il lit) le copieux exposé du père Michael Joseph qui s’adresse à Mortimer lors d’un voyage en train. Il lui propose avant toute chose de sortir de son esprit, toutes les images traditionnelles véhiculées par la littérature populaire concernant la légende du roi Arthur. Il pointe du doigt le fait que son imagerie moyenâgeuse vient du premier historien qui a vulgarisé la légende du roi Arthur à travers son ouvrage Histoire des rois de Bretagne, c’est-à-dire l’évêque gallois Geoffroy de Monmouth (1095-1154/55).

Le lecteur se régale des cases venant illustrer cette évocation : baignant dans des tons jaunis, un navire accueillant des marchandises livrées par des paysans avec une charrette tirée par des bœufs, une procession funéraire, une bataille au corps à corps opposant des Celtes à des Romains, une vision possible de l’île d’Avalon, des dessins avec un fin trait de contour assuré et élégant.


Grands thèmes

Un peu ému par la notion de dernière œuvre de l’artiste et dépaysé par les différents environnements, le lecteur en oublierait presque l’intrigue. Son principe repose sur une chasse au trésor fort alléchante, puisant sa dynamique dans la geste arthurienne, et un dérivé de l’Espadon. À cette chasse au trésor se greffe – dans les dernières planches – une course contre la montre haletante. Quant au rôle d’Olrik, il a été conçu pour mettre Blake face au pire dilemme imaginable : remettre un fléau en liberté, en toute connaissance de cause, pour sauver les vies humaines menacées par les indépendantistes.

Ici, il ne s’agit pas de sauver le monde, mais plutôt d’empêcher un éventuel affaiblissement de la couronne britannique, le duc de Cornouailles et son père devant se rendre sur place pour inaugurer le lancement du chantier d’une caserne. L’insistance du sous-secrétaire d'État au Home Office ne laisse guère planer de doute à ce sujet.

Le récit intègre d’autres éléments, à commencer par une velléité régionaliste, entre autonomie et indépendance, se manifestant par des actes de terrorisme, ou à tout le moins de destructions spectaculaires de biens matériels : le lecteur peut y voir l’écho de mouvements contemporains, voire intemporels. D’un autre côté, les auteurs mettent également en scène des habitants amoureux de leur région et légitimement préoccupés de sa préservation. Il découvre aussi un phénomène socio-économique (typiquement le type d’ingrédient narratif auquel Edgar P. Jacobs n’avait presque jamais eu recours) : le recours à la main d’œuvre immigrée, en l’occurrence des ouvriers d’origine indienne. Étrangement, cette composante est mise en scène deux fois, sans trouver de résolution à la fin, entre composante narrative de circonstance (aussi inutile que gratuite, en fin de compte), et constat par défaut que cette forme de racisme dépasse le cadre une simple intrigue.



Narration et intrigue

Sente opte pour un fil narratif qu’il découpe en quatre sous-intrigues, voire plus : Blake, Mortimer, Olrik et le chef des conspirateurs. Les différentes parties sont équilibrées. Ce saucissonnage permet de gommer tout ressenti de linéarité. Dès le début, les éléments imaginés par Sente s’imbriquent trop facilement pour duper le lecteur. Blake doit se rendre en Cornouailles, Mortimer doit y envoyer son excavatrice de poche et Olrik se voit obliger de partager sa cellule avant deux indépendantistes dont l’organisation a besoin d’une compétence très spécifique. Ce qui amène d’ailleurs le cerveau de toute l’affaire à le souligner lui-même (en planche 18) : la présence d’Olrik dans la même cellule que ses hommes, c’est inespéré !

Assez curieusement, Blake fait un peu office de maillon faible, dans cette aventure. Il est aussi étonné que le lecteur d’avoir été trompé par Olrik (planche 51), ce qui est curieux ; cela pourra même semer une pointe de déception dans le cœur du fidèle. Autre invraisemblance, comment expliquer que le capitaine, un officier chevronné du contre-espionnage, habituellement si lucide, si clairvoyant et si prudent, ne décide pas de cacher la relique qu’il a trouvée, alors qu’il a compris qu’il se trouvait dans un environnement hostile, voire dangereux ?  Quant à Mortimer, comment s’expliquer qu’il ne fasse aucun rapprochement entre le patronyme de l’ingénieur et celui du fils incestueux du roi Arthur, et pire : qu’il semble n’avoir jamais entendu parler de Mordred (planche 41), alors que tout amateur du mythe connaît ce nom ? En dehors de cela, le scénario se déroule néanmoins sans invraisemblance majeur et le lecteur apprécie de découvrir cette histoire malgré les petits défauts évoqués. Il y a même des traits d’humour surprenants, telle la scène du train (première case de la planche 25).



Du respect des codes jacobsiens

L’une des caractéristiques de l’œuvre de Jacobs est l’adroit équilibre entre intrigue policière ou d’espionnage, mystère archéologie ou innovation scientifique majeure (jusqu’à la science-fiction), selon les choix de l’auteur. Sente a décidé de tout intégrer : les comploteurs, le mythe d’Avalon et l’excavatrice de poche. Il l’avait déjà fait avant, et à plusieurs reprises, notamment dans Les Sarcophages du 6e continent et Le Sanctuaire du Gondwana. En cela, s’il faut établir la filiation de Signé Olrik, il faut autant – sinon plus – regarder du côté de la conception un peu systématique qu’a Sente de la série que de celui des grandes bandes dessinées d’aventures que sont Le Mystère de la Grande Pyramide et L’Énigme de l’Atlantide.

Autre quasi-règle : que Blake et Mortimer arrivent à l’aventure par des chemins détournés, la vivent chacun de leur côté en suivant leur propre piste, avant de se retrouver pour le dénouement. À partir de là, Blake va traquer les indépendantistes, tandis que Mortimer, en bon archéologue amateur (c’est comme cela qu’il est présenté dans Le Mystère de la Grande Pyramide – déjà), va s’intéresser aux légendes et aux textes anciens, avant l’inévitable et toujours très attendue convergence des deux fils conducteurs. Les auteurs – faut-il le préciser – émaillent l’album de clins d’œil aux opus du maître. Par exemple, et pour n’en citer qu’un, la discussion de Blake et Mortimer au Centaur Club fera penser à une séquence très similaire – et culte – de La Marque jaune. Enfin, il faut reconnaître au scénariste de ne pas s’être perdu dans des tirade encyclopédiques, ce qui n’a pas toujours été le cas. Oui, il y a de la lecture ; mais non, le texte écrit pas Sente n’a rien d’indigeste. Le progrès est bien là, reconnaissons-le humblement. 



Personnages et caractérisations

Blake et Mortimer sont relativement fidèles à eux-mêmes. Si Blake est souvent réussi (enfin, d’ordinaire, car ici il a l’esprit moins percutant qu’ailleurs, semble-t-il), Sente a toujours eu plus de difficultés avec Mortimer. Sanguin, risque-tout, irrépressiblement curieux et intrépide chez Jacobs, notre ami barbu est bien plus réfléchi chez Sente – plus british, voire plus anglais. Plus humaniste, plus bienveillant, plus progressiste, aussi, encore que la scène de l’altercation, avec Rajesh, rappellera invariablement l’intervention du professeur alors que Sharkey molestait le cheikh Abdel Razek, dans Le Mystère de la Grande Pyramide. Faut-il préciser que c’est Olrik qui est la grande vedette de cet opus ? Le renégat a toujours un coup d’avance sur ses « maîtres ». Il ment, triche et manipule comme jamais. Et avec le sourire, s’il vous plaît ? Dieu qu’il semble s’amuser ! En bon aventurier qu’il est, il reste motivé par l’appât du gain, bien sûr, mais n’hésite pas à mettre sa vie en danger (après tout, c’est lui qui est aux commandes de l’excavatrice) ou entre les mains d’alliés tout récents. Il donne aussi une leçon au conspirateur en chef, le leader du Free Cornwall Group : les scélérats ne se font pas de cadeaux entre eux et le métier ne s’improvise pas. Au fond, on est toujours la proie d’un autre. Et puis il y a cette conclusion, un peu inattendue, qui pourra être comprise comme un écho inversé de celle de L’Affaire du collier.

Les antagonistes sont plutôt fonctionnels (tout comme la plupart des figurants, d’ailleurs) et ne resteront pas dans les annales de la série. Le visage de celui qui tire les ficelles reste dans l’ombre le temps qu’il faut, dans la plus pure tradition de la bande dessinée d’énigme policière, à la manière de Ric Hochet ; un artifice de Sente, car le lecteur l’aura démasqué assez rapidement – bien que l’auteur soit suffisamment rusé pour intégrer une fausse piste dans son intrigue. Le scénariste réutilise quelques personnages secondaires connus, sans doute pour la forme, car leur rôle est particulièrement restreint. Le lecteur retrouvera ainsi David Honeychurch (le second du capitaine Blake au MI5), le colonel Cartwright, sir Charles Garrison (le surintendant de Scotland Yard) et le chercheur Driss Alaoui. Enfin, la place inexistante des femmes dans cette histoire a déjà été évoquée plus haut. C’est d’autant plus étrange que les auteurs de la reprise avaient, au fil des années, créé plusieurs personnages féminins : la scientifique (et transfuge) Nastasia Wardynska, l’agent du FBI Jessie Wingo, la romancière Sarah Summertown ou encore Eleni Philippidès. Et Sente n’était pas le dernier en la matière, puisque c’est lui qui a introduit la plupart de ces héroïnes. Alors, qu’est-ce qui explique ce retour en arrière, surtout de la part d’un auteur qui a fait souffler une « vague féministe » (osons) sur la série ?



Narration visuelle

Ce tome constitue la dernière œuvre d’André Juillard, achevée peu de temps avant son décès. Le lecteur peut savourer la narration visuelle avec cette idée en tête, ce qui peut l’amener à regarder les planches, plus sous cet angle que sous celui d’une émulation de celles d’Edgar P. Jacobs. L’artiste réalise des dessins respectant les grands principes de la ligne claire : des contours systématiques, des dessins conçus pour des couleurs en aplat, pas d’ombre pour les personnages, des reproductions de véhicules aussi fidèles que possible, des décors réalistes, une construction recherchant la meilleure lisibilité possible. En outre, il s’accommode des spécifications imposées par l’exercice de style de respecter les caractéristiques de la série : des phylactères qui peuvent s’avérer très imposants en prenant plus de place que le dessin dans une case, et un lettrage en bas de casse.

Le lecteur observe que l’artiste favorise des traits de contours particulièrement fins, minutieux, à l’épaisseur régulière, une fausse simplicité, un rendu qui lui est propre, un peu éloigné de celui de Jacobs, peut-être plus figé, avec moins de mouvement. Il approche les représentations avec le souci de la plausibilité et du réalisme, sans artifice pour aller au plus court, pour simplifier la prise de vue ou pour éviter une prise de vue trop complexe. En filigrane, le lecteur apprécie l’élégance discrète des personnages, la richesse des décors et des accessoires, la diversité de lieux et des actions. Il y a là un équilibre entre détail et lisibilité qui reste admirable, comme si rien n’était superflu, mais qu’il n’en fallait pas moins.

La perspective de ne plus pouvoir découvrir de nouvelles planches de cet artiste rend peut-être le lecteur plus sensible : il savoure plus consciemment certains moments. Olrik chutant à travers la trappe, en contreplongée, en pensant à la violence soudaine du choc quand le nœud coulant va se resserrer autour de son cou. L’avion Westland Lysander effectuant une manœuvre serrée pour passer au plus près de la façade de Scotland Yard. La posture très guindée des officiels autour d’une grande table dans un bureau du même établissement. Les efforts de Blake et d’un ouvrier pour dégager un coffre enserré dans des moellons. Le mouvement de levier avec un tournevis pour faire céder le châssis d’une fenêtre fermée. Mortimer montant à cheval pour une randonnée dans la campagne. La découverte de l’intérieur de l’église de Longval. La beauté des paysages côtiers avec les formations rocheuses et les grottes. La conversation téléphonique de Blake et Mortimer avec David Honeychurch, devant cet appareil antique et cette paroi lambrissée. Et bien sûr l’avancée souterraine de l’excavatrice La Taupe à travers les parois rocheuses. À ce moment, le lecteur se fait la réflexion que la narration comprend des moments attendus et emblématiques : aventures souterraines (occurrence régulière dans la série) ou Blake et Mortimer devisant posément devant un feu de cheminée. La forme de l’excavatrice de poche pourra quand même susciter une forme de perplexité chez certains lecteurs : le diamètre de la foreuse étant inférieur à celui de l’habitacle (la carlingue), comment la partie supérieure de l’appareil ne peut-elle pas se retrouver forcément coincée par la roche au bout de quelques décimètres ? Et en conséquence, comment cet engin peut-il avancer ? 



Conclusion

Un album de plus dans la série des Blake & Mortimer, certes, et aussi le dernier réalisé par André Juillard, l’un des dessinateurs historiques de sa continuation. Un bel album pour sa narration visuelle à la clarté exemplaire, à la richesse discrète et tangible, à l’élégance inégalée de la ligne claire. Une intrigue sur une trame classique, intégrant les éléments récurrents attendus de la série, et proposant une aventure mêlant dépaysement, enjeux régionalistes et mythologie, avec une approche inattendue du mythe du roi Arthur. Des clins d’œil réussis et des déjà-vu discrets. Malgré ses faiblesses (les caractérisations de Mortimer et des antagonistes), une narration qui respecte la plupart des codes jacobsiens et leur rend hommage sans les singer ni sombrer dans la caricature non voulue. Enfin, la disparition de l’artiste – il était le dessinateur numéro un de la reprise - pose un défi de taille à l’éditeur : lui trouver un successeur suffisamment convaincant et performant sur la durée.




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