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mercredi 27 août 2025

In vino veritas

L’émotion du premier baiser… Des premiers émois… Des papillons dans le ventre…


Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Son édition originale date de 2025. Elle a été réalisée par Irene G. pour le scénario, et par Manolo Carot pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il comprend soixante-deux pages de bande dessinée. Il se termine par une galerie de cinq pages comprenant quatre illustrations en pleine page, et deux en demi-page.


Un soir de la saint Sylvestre, huit amis se sont regroupés dans la maison d’un des couples. Les enfants sont couchés et dorment, la nuit est bien avancée. Les fêtards clament : Du vin ! Du vin ! L’un d’eux énonce qu’aucun verre ne doit rester vide. C’est le jour de l’an, toutes les bouteilles doivent être finies ce soir ! Il affirme qu’il a confiance en eux, ses amis, ils peuvent le faire. Il trinque : À leur vie ! Parce qu’ils ont tout ce dont ils peuvent rêver. Un autre ajoute : Eh ouais, comme les travelos ! Pam tance David en le traitant de relou. Max ne comprend pas pourquoi elle dit ça. David explique : ils ont une paire de seins, de belles fesses, et un membre entre les jambes, techniquement ils ont tout pour eux. Un autre conteste : il dit ça comme ça, mais on sait qu’ils sont tous obsédés de la chatte, un trou est un trou. Un autre demande si l’un des convives l’a déjà fait, et lui il l’ajoute sur sa liste de résolutions de l’année. On verra bien qui aura le courage de le faire. Le mari de Cassy indique que lui l’a déjà fait. Un autre lui demande de raconter, de ne pas s’arrêter là. Le dessinateur continue : il va leur raconter cette histoire. Mais pour que ce soit plus drôle, il leur propose de faire un jeu. Ce jeu s’appellera : Petites confessions entre amis. Une convive répond qu’elle adore les jeux. Pam estime que ça sent la grosse bêtise, mais qu’il explique.



Le dessinateur explique : C’est très simple. Chacun devra raconter dans le moindre détail son expérience sexuelle la plus obscure, secrète et inavouable. Un des convives indique que ce sera sans lui, un autre qu’il ne sait pas s’il va oser. David trinque à leurs petites confessions ! Avec leur permission, il leur montre la voie avec l’histoire la plus incroyable qu’ils aient jamais entendue. Pour ça, il faut remplir les verres à ras bord ! C’était une nuit d’été pendant un repas d’affaires. Il était crevé, il avait passé la soirée avec des personnes et des conversations ennuyeuses à mourir. Après s’être laissé remplir son verre à ras bord, il entame son anecdote. Dans le restaurant en bord de mer, tout le monde parlait budget, courbe de croissance, chute des prix de l’immobilier, etc. Soudain l’attention de David est attirée par une personne qui passe. Il tourne la tête et il voit une femme superbe sortir du restaurant et marcher sur la plage, jusqu’au bord de l’eau. David la voit se jeter dans la mer. Il sort en courant du restaurant, et plonge à son tour dans l’eau. Il parvient à rattraper la jeune femme et à la tirer sur la plage. Il commence à lui faire du bouche-à-bouche. Elle revient à elle et elle lui passe les bras autour du cou pour transformer le geste de sauvetage en une étreinte passionnée.


En prenant un peu son temps pour détailler l’illustration de couverture, le lecteur distingue sept ou huit corps nus dans une étreinte sensuelle. Il est vraisemblable qu’il ait choisi cette bande dessinée en toute connaissance de cause, puisqu’il s’agit d’un éditeur spécialisé dans les bandes dessinées pour public averti. Il s’agit bel et bien d’un ouvrage pornographique, très explicite, avec des gros plans. Sept des convives vont raconter à tour de rôle leur expérience sexuelle qu’ils jugent la plus obscure, secrète et inavouable. David avec une prostituée sur une plage, quatre pages. Pam avec deux sportifs dans une salle de sport, cinq pages. Max avec la mère de sa copine, six pages. Lara avec un de ses professeurs marié, quatre pages. Cassy se masturbant devant un dessin, quatre pages. Le dessinateur avec un transsexuel, huit pages. Fred à l’occasion d’une méditation spirituelle, sept pages. Soit un total de trente-huit pages explicites et graphiques. Chacune de ces séquences est dépeinte de manière très graphique, dépourvue de tout mot, avec parfois de rares phylactères comprenant juste une icône pour expliciter une intention. Les auteurs alternent donc les échanges entre les convives, la présentation rapide de la scène qui va suivre par l’invité qui livre sa confession, et les expériences proprement dites. L’artiste utilise deux modes de dessins différents : des traits épurés pour les discussions, des traits plus appuyés et des corps beaucoup plus incarnés pour les scènes chaudes.



Un ouvrage qui ne fait pas semblant : tout commence avec une couverture où des corps dénudés se mélangent. Puis l’illustration de la page de titre est totalement explicite avec sexe en érection, fellation et éjaculation. La première séquence de rapport, sur la plage, montre des gros plans pour un cunnilingus, avec sexe offert, et une solide érection pour le narrateur. Madame dispose d’une poitrine opulente. Le pénis de monsieur semble de taille normale, fortement innervé. Lors de la deuxième séquence, le dessinateur montre à nouveau les sexes en gros plan, avec double pénétration dont le lecteur n’ignore aucun détail, et éjaculation simultanée. La suivante commence par un instant de fétichisme sur une petite culotte en dentelle dans la chambre de la mère. Il s’en suit un rapport rapide et intense, avec à nouveau des gros plans, même si les deux partenaires restent habillés tout du long. Le suivant comprend une belle fellation, suivie par une position un peu acrobatique. Et les autres sont tout aussi dépourvus d’hypocrisie dans leur représentation, avec une attention particulière pour le rendu de la chair, l’artiste privilégiant des formes pleines d’adulte, plutôt que des corps fluets ou graciles qui pourraient faire penser à des adolescents à peine adultes.


Dans les brefs remerciements, Irene G. exprime sa reconnaissance au dessinateur, son compagnon, pour lui avoir permis d’être sa complice dans cette grande aventure faite d’amour, de passion et de créativité. Elle ajoute que chaque ligne de cette bande dessinée s’inspire de la complicité, des rires, des secrets et de l’intimité qu’ils partagent. Elle conclut que c’est un vrai privilège de pouvoir explorer ensemble les moindres recoins de leur imagination et de transformer tous ces moments en art. En effet le lecteur peut apprécier la variété des situations proposées, qui restent classiques, la vitalité des partenaires, l’intensité des étreintes, et à chaque fois quelques détails qui les rendent spécifiques. Chaque séquence de relation physique étant dépourvue de mots, ce sont les images qui apportent toutes les informations. Dès la première, le lecteur sourit en découvrant les icones dans les phylactères, au total de huit, venant comme un commentaire visuel sur les envies de l’homme ou les ressentis de la femme. Il constate également que les auteurs montrent la forme un peu courbée du pénis, et la coupe particulière des poils du pubis de la femme. Ainsi chaque séquence comporte des particularités qui en font plus qu’une simple collection d’images pornographiques génériques : la musculature des sportifs à la salle, ainsi que celle de Pam, le comportement énervée de la mère avec le copain de sa fille, le décalage de réaction de l’étudiante, l’intensité de la concentration de la jeune femme sur ses ressentis en se masturbant, la délicatesse et la prévenance de l’exploration entre l’homme et la personne trans (ainsi que ses piercings au téton), et la séquence onirique aux magnifiques couleurs de l’accouplement avec la déesse hindoue (des visuels de toute beauté).



Le lecteur ressent que les auteurs ont travaillé sur une forme de scénario plus étoffé que ceux de circonstance dans ce genre de bande dessinée. Certes la situation de départ sert de cadre pour que chacun raconte son expérience qui sort le plus de l’ordinaire, la plus mémorable comparée à la vie quotidienne. Cela permet de mettre en place chacune des scénettes à intervalle régulier, et entretemps chaque convive peut exposer le contexte de ce qu’il va narrer. Cela offre aussi l’occasion à chacun de réagir sur le comportement de l’un ou de l’autre. En fonction de son état d’esprit, le lecteur peut y voir des échanges banals de circonstance pour meubler entre deux scènes d’action, ou bien des interrogations, des constats des deux auteurs, à l’occasion de la réalisation de ce projet. En une ou deux phrases, les convives évoquent les professionnelles du sexe et leur choix de faire ce qu’elles veulent de leur corps, la volonté propre des femmes dans la recherche de relations sexuelles, le choix de dévoiler ses secrets et les conséquences émotionnelles, l’hypocrisie des relations extraconjugales des hommes mariés et pères de famille, la recherche de nouvelles premières fois (pour les premiers émois, les papillons dans le ventre…), le questionnement honnête sur le dégoût éprouvé pour la chair d’une personne du même sexe, le temps qui passe et l’impression de ressembler de plus en plus à son père (ce pauvre mec que personne n’aime, que personne n’admire, qui est de plus en plus triste et qui a baissé les bras depuis longtemps. Finalement ses souvenirs d’activité sexuelle agissent comme un révélateur de malaises personnels, un récit de genre qui va bien au-delà de sa condition.


La bande dessinée pour adultes est un genre en soi, très codifié, et dont les conventions priment généralement sur tout le reste, ne laissant aucune place pour autre chose. Les auteurs réalisent un récit de genre on ne peut plus explicite, avec des séquences graphiques et pleines de vitalité, sans aucune hypocrisie par rapport à ce genre. Progressivement, le lecteur se rend compte que les scènes de transition entre deux rapports font apparaître des doutes et des interrogations qui relèvent de l’intime psychologique et émotionnel. Une œuvre de genre plus sophistiquée que le tout-venant.



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